Les grands samuraï de l'Empire du Soleil Rouge

Moi,

Takara,
née Yatagarasu,

voici que je suis maintenant Daimyo du clan Karasu

et alors que les années tendent des fils d'argent dans mes cheveux et dessinent leurs marques sur mon visage, je ressens le besoin d'écrire ces lignes, afin que les générations futures se souviennent des grands samuraï qui ont foulé les routes de l'Empire du Soleil Rouge.

Honneur au plus grand d'entre eux, Nihon.
A chaque fois que j'ai eu l'occasion de contempler l'Empereur, c'est son regard qui m'a frappé. Que son corps soit celui d'un vieillard ou d'un jeune homme, on peut à chaque fois lire dans ses prunelles la sagesse sans bornes qu'il a accumulé au cours de ses longues vies. Cela seul vous persuade que l'Empire ne peut exister sans lui.
Ses décisions nous semblaient parfois surprenantes, mais qui d'entre nous peut espérer savoir mieux que Lui ce qui est bon pour l'Empire ? Ce serait un bien grand orgueil que de le croire.
Voilà pourquoi chacune de ses paroles devait sonner comme un ordre. Car le propre d'un samuraï est de servir son Seigneur, et avant d'être un daimyo, je suis un samuraï.

Parlons des seigneurs passés maintenant.

Torayama Jotaro
Ce n'est pas tant la cicatrice profonde qui marquait son visage qui devait effrayer. Je sais depuis de nombreuses saisons que l'apparence physique n'est pas le reflet de l'âme d'un samuraï. Mais sa réputation suffisait à faire trembler le sabre de celui qui osait lui faire face. On a dit qu'il avait livré cent dix huit duels et avait vaincu cent dix sept adversaires.
Sa parole portait loin sans qu'il n'ait à élever la voix et j'imagine que même les créatures de la terre des ombres devaient trembler devant lui. Son courage était sans égal. Ne l'ayant rencontré qu'une seule fois, j'ai pourtant ressenti à quel point sa perte fut un coup terrible porté à l'Empire.

Yatagarasu Fujiwara
Ici je sais pertinemment que mes lignes ne seront pas aussi neutres qu'elles le devraient, mais comment parler sans émotions de celui qui fut pendant de longues années le Shogun de l'Empire ?
Une simple remarque de sa part pouvait ruiner votre réputation à néant ou vous porter aux nues. Etait-il sage ? Je ne saurais, aujourd'hui encore, l'affirmer. Mais sa préoccupation était de rendre l'Empire plus fort contre ses ennemis. Le servir était un honneur. Je m'abstiendrai de juger ses actes car je sais qu'il a agi pour le bien de l'Empire avant tout.
En le servant j'ai appris à soigner mon apparence, et à ne jamais négliger les marques de respect données ou reçues. J'ai aussi appris à ne livrer qu'une part de ma pensée et de mes émotions. Ce qui finalement me rend la tâche moins pénible aujourd'hui. Il fut un grand seigneur... avant tout.

Saru Moko
Enigmatique daimyo du clan Saru. Malgré son air aimable il semblait pourtant être plus que cela. Sa morphologie incitait à penser qu'il n'était pas novice en matière de combat, même si je ne l'ai jamais vu en action. Un homme difficile à cerner, que peu peuvent se vanter d'avoir réellement connu je crois, à part l'Empereur.

Kitsune Matsushiko
Sa beauté était sans égale et on ne pouvait la saluer sans tomber immédiatement sous son charme. Ancienne régente de la cité des fleurs de jade, détruite après la mort de l'Empereur, elle fut nommée daimyo à un moment difficile pour le clan Kitsune. Encore une fois, l'apparence n'était pas liée à l'âme qu'elle cachait, puisqu'elle complota contre Fujiwara. Les anciennes rancunes peuvent être mortelles.
J'ai su d'instinct, en la laissant à kyuden Karasu en compagnie de Fujiwara qu'il s'agissait d'une erreur. Mais je me devais d'obéir aux ordres du Shogun.

Kuma Kaneda
La liste des Daimyo Kuma est longue, mais c'est le prix à payer pour défendre les frontières de l'Empire contre les créatures des ombres. Kaneda ne faisait pas exception à la réputation de son clan. Il était brutal, préférant le no-dashi à toute autre arme. On ne pouvait attendre de lui aucune politesse ou amabilité. Il ne me voyait que comme une faiseuse de thé. Je regrette de n'être parvenue à gagner le respect des Kuma qu'après sa mort. Son orgueil l'aurait peut-être obligé à conserver son opinion à mon sujet. Je ne le saurai jamais.
On ne peut lui dénier son courage en matière de combat. Il fallut d'ailleurs un oni-ryu pour venir à bout de lui.

Tous les daimyo que j'avais pu rencontrer au premier tournoi de l'aurore sont désormais morts. Mais ils n'ont pas été les seuls à donner leur vie pour l'Empire, et j'aime à me rappeler d'autres noms.

Kuma Kohe
Karo de Kaneda, il n'avait rien de commun avec l'image que l'on se fait habituellement d'un Kuma. Mince et agile, il était capable d'apprécier à sa juste valeur une tasse de thé, sans que cela ne nuise à son ardeur au combat. Il aurait été un daimyo avisé pour succéder à Kaneda.
Kohé avait été mon adversaire désigné durant l'épreuve de corps à corps du tournoi de l'aurore. Nous étions jeunes samuraï alors, et il ne m'a jamais mal considérée malgré nos différences. L'oni-ryu a emporté ses éclats de rire en même temps que son seigneur. Certaines pertes coutent plus cher que d'autres même si elles sont nécessaires à la survie de l'Empire.

Kitsune Kanna
Karo de Matsushiko, j'ai toujours su qu'elle nous considérait comme des ennemis. la haine a toujours brûlé au fond de ses prunelles quand elle regardait un Yatagarasu. Son pouvoir était réputé, et quand elle choisit de se dresser contre l'armée shogûnale, l'ordre fut donné de la tuer en priorité. La sorcière Kitsune était puissante, mais elle fut terrassée.
Peut-être que si j'étais parvenue à la faire épouser Torayama Kaito la guerre n'aurait pas eu lieu... peut-être...

Torayama Kaito
Daimyo du clan Torayama, il avait hérité de la charge à la mort de Jotaro. Entrevu sur un champ de bataille, en tant qu'ennemi, mon image de lui ne peut être que parcellaire. J'ai le souvenir d'un homme assez grand, en armure. Un samuraï s'il en est, à défaut d'avoir été un seigneur capable d'empêcher cette guerre sanglante.
Il se battait avec acharnement et n'a pas songé à rompre un moment. Je me suis demandé s'il s'agissait de courage ou d'entêtement. Ce fameux orgueil Torayama qui lui fit tenir tête à une armée bien plus puissante que la sienne jusqu'au dernier moment.

Kuma Asami
A la mort de Kaneda, et sans karo, il fallut nommer rapidement un nouveau daimyo et Asami fut alors choisie. Cela tenait plus au fait que la jeune femme ait survécu au combat contre l'oni-ryu qu'à ses talents de meneuse d'hommes. Diriger le clan chargé de protéger la frontière de l'Empire contre les créatures de l'ombre est une lourde tâche. Encadrée de bons officiers, Asami aurait pu la mener à bien, mais la guerre civile éclata.
Asami, corrompue par l'Ombre, fut tuée par l'armée Shogûnale alors qu'elle tentait de nous convaincre de rebrousser chemin avant les combats.
Les daimyo Kuma ne vivent jamais longtemps.

Kuma Kenshiro
Je ne peux parler des héros de l'Empire sans nommer le maître d'armes du clan Kuma. il n'était réputé ni pour sa politesse, ni pour ses manières raffinées. Son corps couturé de cicatrices montrait assez à quel point il avait versé son sang en combattant les abominations crachées par la terre des ombres. Sa puissance brute faisait craindre à chacun le moment où il nous convoquait sur le tatami pour l'affronter... comme il l'a fait pour moi.
Je sus franchir sa garde, toucher un point sensible. Je sus le faire changer d'avis à mon propos.
Je le vis affronter l'oni-ryu avec courage. Je le vis survivre, et se donner la mort sans un cri, avec honneur.

Torayama Takaïchi

C'est à la bataille de kyuden Torayama que je le vis pour la dernière fois. Comment reconnaître dans ce samuraï portant l'armure, le jeune homme qui avait participé au tournoi de l'aurore ? En toute honnêteté j'en aurais été incapable. Peut-être que mon jugement n'était pas le plus sûr à cette période de ma vie, obscurci par les nuées qui s'amoncelaient sur l'avenir de l'Empire, et sur le poids de mon passé. A ma grande honte, je dois avouer pourtant que ce samuraï me fit trembler.
Le sol était rouge du sang répandu, et l'on trébuchait sur les mourants. Vague après vague l'armée shogûnale avait taillé en pièces les rebelles. Torayama Kaïto était tombé à son tour, et pourtant, alors qu'une poignée de soldats nous faisaient encore face, précédés par deux samurai, je crus notre fin toute proche.
Car le terrible Takaïchi était encore là. Il avait arraché de son torse les lambeaux de son armure inutilisable et chacun de ses coups de sabre se révélaient fatals pour l'un des nôtres. Un oni ne m'aurait pas paru plus formidable que cet homme-là, qui faisait hésiter une armée. Il se battait sans haine, avec un talent et une puissance inégalée. Comme s'il n'avait même pas eu besoin de reprendre son souffle.
Et aujourd'hui encore, je sais que je peux écrire ces lignes car il n'a pas jugé bon de croiser le fer avec moi.

Il fallut un nouvel assaut de nos troupes pour en venir à bout. Quel immense gâchis pour l'Empire...

Torayama Shigenobu

Ses premières paroles, moqueuses par dessus la rumeur de l'armée s'amoncelant devant Kyuden Torayama, s'adressaient au daimyo Kuma. Je ne pouvais m'empêcher de le voir comme un lion affamé qui ne cherchait que l'affrontement et aurait saisi n'importe quel prétexte pour cela.
Ma surprise fut de le voir me choisir comme adversaire durant la bataille. Sa tête bien au dessus de la mienne, sa musculature forgée par des saisons d'entraînement, les coups qu'il me portaient étaient puissants. Cela ne suffit pas.
Seul aux côtés de Takaïchi, à la tête d'une poignée de survivants, son dernier ordre fut de nous encercler. Je ne peux lui dénier un certain courage face à la mort.

Yatagarasu Soyokaze

Un dévouement incroyable envers le shôgun, s'appliquant à sauver des vies plus qu'à les détruire, voilà comment était la première fusui du clan Yatagarasu, et celle qui fut assez proche pour recueillir mes confidences.
Aussi puissante que Kanna, Soyokaze fut elle aussi une des victimes de la bataille de Kyuden Torayama. Elle préféra me soigner, juste avant que Takaïchi ne l'affronte.
Je reste persuadée que la suite des évènements aurait tellement attristé Soyokaze que cette fin fut la meilleure qu'elle pouvait avoir. Survivre n'est pas toujours une bonne chose.

Torayama Miyoko

Karo de Torayama Kaito, notre première rencontre au palais Yatagarasu ne m'avait laissé que peu de souvenirs. Aurais-je pu lire dans ses yeux les projets terribles qu'elle imaginait ? Je n'en suis pas sûre.
Pourtant, alors que la bataille de Kyuden Torayama faisait rage, elle pénétrait dans notre palais - que j'avais du quitter moi aussi sur ordre de Fujiwara - pour l'assassiner !
J'ai toujours cru, et je crois encore aujourd'hui qu'il y avait une autre solution. Et sa mort, des mains du seigneur Seigikami Harada, reste amère à mon goût et symbole du gâchis de cette époque.

Yatagarasu Seiryoku

Le karo de Yatagarasu Fujiwara n'avait rien de la courtoisie de son seigneur. Parfois même il oubliait la politesse la plus élémentaire. Ce n'était pas pour froisser délibérément ses interlocuteurs, il était homme d'action et j'imagine qu'à ses yeux il s'agissait d'une perte de temps. Pourtant, bien fou aurait été celui qui aurait cru son esprit stupide car c'était très loin d'être le cas.
C'est à lui que Fujiwara confia l'armée Shôgunale lors de la bataille de Kyuden Torayama, et ses décisions furent dictées par la nécessité d'en finir au plus vite. Il ne fait aucun doute qu'après la victoire, il aurait donné l'ordre d'aller prêter main-force en terres Kuma.
Cependant, l'Empereur lui demanda de suivre son seigneur dans la mort. Et Seiryoku s'est incliné, avec noblesse. J'ai souffert de n'avoir pu l'assister jusqu'au bout afin de rendre son seppuku moins pénible. Il aurait fait un grand Daimyo.

Yatagarasu Chiemi

Silencieuse, Chiemi faisait partie de ces officiers de mon âge qui servaient fidèlement Fujiwara. Je l'ai rarement vu exprimer une émotion, et c'est sans surprise qu'elle demanda à l'Empereur de rejoindre son seigneur dans la mort.
Admirable combattante, véritable samuraï, que dire de plus ?