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 Pensées pêle-mêle

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astaroth
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MessageSujet: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyVen 4 Déc - 12:50

Premier feuillet

À celui qui trouverait ce carnet : faites-en ce que vous voudrez.
S'il n'est plus en ma possession, c'est soit que je suis mort, soit que je m'en suis débarrassé... À moins que je ne l'aie tout simplement perdu?
Mais quelle qu'en soit la raison, je n'en ai pas réellement besoin. Ne parcourez donc pas l'Empire pour me le rendre.

Si vous êtes curieux de savoir ce qui y est raconté, ne vous gênez pas, lisez. De toute façon, c'est déjà ce que vous êtes en train de faire.
Je sais ce que c'est que la curiosité...

Je n'ai pas eu la prétention, ici, d'écrire un grand récit, épique, plein d'exploits, qui devrait traverser les générations.
Ceci n'est qu'un carnet relatant mes voyages, mes nombreuses rencontres et les réflexions qui ont découlé de tout cela.
Mon carnet.
Celui de Karasu Kagehisa, l'un des premiers Shugenja au service du clan Karasu.
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyVen 4 Déc - 12:51

Deuxième feuillet

Je ne sais pas vraiment pour quelle raison je me suis mis à écrire dans ce carnet. Peut-être parce que, depuis que j'ai passé mon gempukku, j'ai déjà pas mal voyagé. De ce qui fut le Kyuden Seigikami aux terres du clan Saru en passant brièvement par celles des fiers Torayama, des regrettés Yachu et des puissants Kuma... Je dois dire que j'ai accompli du chemin et vu de nombreux paysages, même si ce ne fut pas toujours de tout repos...
Peut-être aussi parce que, pour une fois, je peux souffler un peu. Enfin, je devrais plutôt dire « parce que pour une fois je ne suis pas sur les routes », ce serait plus correct. Car la garde du Kyuden demande du temps et de l'investissement, mais au moins puis-je parfois m'asseoir dans un coin, au calme, pour écrire un moment.
Comme maintenant.
Depuis combien de temps n'ai-je plus pu me retrouver ainsi, des feuilles blanches étalées devant moi, la plume en main, ma pierre à encre prête à l'emploi ?
Seul avec mes idées et mes pensées.
Il y a longtemps.
C'est certain.
Et peut-être pas pour longtemps... Il y aura certainement bientôt quelqu'un pour réclamer mon intervention quelque part. Non pas que je me plaigne : servir ainsi mon clan est ma plus grande fierté, mais il est bon de temps à autre d'avoir l'occasion de ne rien faire sinon se plonger dans ses propres réflexions.
Des instants qui se font rares lorsqu'on est officier...
Mais qui aurait pu penser que le jeune samurai timide que j'étais, qui venait juste de passer son gempukku, et à qui personne ne demandait donc son avis deviendrait un jour Shûno du clan Karasu? Pas moi certainement.
J'ai pourtant toujours su, dès le premier instant où j'ai fait sa connaissance, que Kagetoki-san prendrait un jour cette place au sein de notre clan... Et peut-être même ira-t-il plus loin encore, un jour.
Mais moi...
Un Shugenja... Un enfant qui, s'il était né un peu plus tôt, aurait pu trouver la mort comme tant d'autres garçons détenant le don. Une sorte d'aberration aux yeux de certains en quelque sorte.
Un jeune homme timide, de plus, qui avait eu du mal à trouver le courage de s'exprimer devant la foule de samurai aguerris massée dans le palais alors que celui qui est devenu mon ami par la suite, lui, était arrivé avec un air sûr de lui et triomphant, le sourire aux lèvres.
Un tout jeune samurai mal à l'aise face aux regards curieux qui se posaient sur lui à chaque fois qu'il parlait de sa formation inhabituelle.
Oui, voilà ce que j'étais. Et voilà en quelques mots comment s'est déroulée ma première entrevue avec notre Daimyo, Shunbin-sama, devenu notre estimé Shogun depuis lors. Je m'en souviens encore parfaitement et je ne pense pas pouvoir l'oublier tant les sentiments qui furent miens en cet instant se sont gravés profondément dans ma mémoire.
Mais bien que je sois capable de me remémorer toutes les appréhensions qui m'ont parcouru, et notamment la peur de ne pas être accepté à cause de mes pouvoirs particuliers pour un homme, je ne les ressens plus désormais. Depuis un bon moment déjà. Plusieurs années en vérité. Ce qui me nouait autrefois la gorge s'est petit à petit envolé pour ne plus jamais revenir.
Et peut-être est-ce là toute la différence.
Peut-être est-ce ce qui a fait que je suis devenu digne de l'honneur d'être nommé Shûno il y a quelques temps...
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptySam 30 Jan - 23:35

Troisième feuillet

En parlant de Kagetoki-san... Il y a des jours où je m'interroge sur la façon dont nous avons réussi à devenir amis. Nos caractères étaient si dissemblables.
Lui toujours si fier, volontaire, sûr de ses gestes et de ses paroles, peut-être même un peu trop parfois...
Et moi? Oui, si je devais me qualifier à l'époque, je choisirais des mots tels que discret, timide, presque effacé même.
Bref, alors que l'un possédait déjà toutes les qualités du samurai, ou peu s'en fallait, l'autre avait encore du chemin à faire.
Si cela s'était déjà remarqué dans le palais, face à Shunbin-sama et aux hauts dignitaires de notre clan, cela se marqua encore plusieurs fois par la suite durant certaines missions ou même pendant nos entraînements au sein de notre dojo.

Dans ma famille, on a toujours regretté que je ne sois pas plus porté que je ne le suis vers les armes. J’ai suivi les enseignements martiaux que l’on m’a prodigué durant toute mon enfance, mais je dois avouer que je n’arrivais pas à me décider, à trancher entre ce que je préférais entre mon don naturel et le combat au sabre. J’ai pourtant toujours été capable d’apprécier la courbe délicate et la froide beauté de cette arme de mort qu’est le tachi que j’ai obtenu de mon géniteur, mais j’aimais tout autant percevoir la force des énergies élémentaires autour de moi alors que je tentais de les apprivoiser.
C’est probablement cette incertitude qui fit que, à 15 ans, j’en étais juste assez loin dans mes connaissances de l’une et de l’autre voie pour réussir mon gempukku, mais pourtant pas assez que pour prétendre être un élément réellement prometteur.
Du moins, tel était mon avis sur moi-même, et plus encore lorsque je pus observer pour la première fois un combat d’entraînement entre Kagetoki-san et son frère, Hitoshi-san, ce dernier étant tout comme moi un shugenja.
Mon futur ami semblait déjà tellement à l’aise, son bokken fendant l’air et trouvant déjà des failles dans la garde de son opposant, alors que moi je n’avais même pas osé défier quiconque en combat en entrant dans le dojo, impressionné par la force que tous semblaient afficher par rapport à moi.
Je m’étais donc contenté de me saisir d’un bokken et de répéter mes kata, seul dans mon coin, tentant de me concentrer sur mes gestes bien que mon regard revienne régulièrement à l’observation des deux frères.
Et j’aurais pu rester là toute la journée. J’aurais pu continuer à les regarder avec envie tout en n’osant pas me montrer ni m’afficher, idiot que j’étais et manquant cruellement de confiance en moi, si l’un des Shûno de l’époque n’avait pas brusquement été pris de l’envie de s’intéresser à moi.
Peut-être était-ce de la pitié de sa part… Ou plutôt non, à la réflexion, à présent que je l’ai bien connue, je pense pouvoir affirmer qu’il s’agissait plutôt d’une gentillesse toute naturelle et d’une bienveillance à l’égard des jeunes qu’elle a manifesté à cet instant-là… Yuko-sama. Elle m’a invité à m’entraîner avec elle tandis que Kagetoki-san, lui, changeait de partenaire et ripostait aux assauts de Yasu-sama qui l’avait engagé à la suite d’une histoire plutôt cocasse de sabre et de haori lui ayant été mis dans les bras sans lui demander son avis.
Nos aînées nous laissaient à chacun des ouvertures… Elles n’avaient même pas pris la peine de se saisir de leurs bokken. Mais si Kagetoki-san arrivait à passer la garde de son opposante, moi je me suis retrouvé dans l’incapacité de porter le moindre coup.
Et pourtant… Alors que dès le premier instant j’ai envié l’assurance et la réussite de ce samurai de mon âge, je ne m’en suis pas occupé pour une fois. Parce que Yuko-sama venait de me regarder avec fierté, parce qu’elle avait eu des mots que jamais personne n’avait encore eu à mon égard à l’époque.
Et c’est peut-être à cet instant que ma conception des choses à commencé à changer, alors que je lui répondis par un de mes premiers sourire franc qui tranchait avec l’affable qu’on m’avait appris à afficher en permanence, quelle que soit la situation.

Mais je m’égare… Mis à part que cela a peut-être contribué à changer la vision envieuse que j’avais de Kagetoki-san en une admiration plus saine, cela n’explique pas comment nous en sommes arrivés à avoir cette entente désormais reconnue de tous.
Peut-être est-ce parce que, après avoir combattu Yasu-sama, il est venu me trouver de lui-même pour se mesurer à moi et que durant cet échange nous avons pu en apprendre beaucoup l’un sur l’autre. Et notamment, pour ma part, que j’étais capable de lui tenir tête malgré tout ce que je pouvais penser de la maigreur de mes capacités martiales…
Peut-être est-ce parce que, cette même journée, alors que Yuko-sama nous relatait de quelle façon le clan Osamaru s’était scindé en deux pour redevenir Karasu et Seigikami, ainsi que la bataille qui avait suivi avec les Torayama, nous sommes naturellement tombés d’accord sur le fait que nous devions être les meilleurs au tournoi qui s’annonçait. Parce que nous devions leur montrer à tous que Karasu serait toujours au dessus des autres, que ce soit du point de vue des armes ou de l’honneur.
Peut-être est-ce parce que, souvent, il est arrivé que l’on nous confonde à cause de la similitude de nos prénoms…
Peut-être parce que nous sommes souvent partis en mission ensemble pour notre clan.
Peut-être cela était-il écrit, tout simplement…
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyVen 5 Mar - 14:01

Quatrième feuillet

Cette question qui m'a occupé l'esprit sur la page précédente n'a plus lieu d'être. J'aurais voulu en discuter avec Kagetoki-san... C'eut été un bon prétexte pour évoquer nos plus jeunes années, nos toutes premières passées au service de notre clan.
Mais désormais ce n'est plus possible.
Kagetoki-san n'est plus de ce monde.
Cette réalité... Je sens que je vais avoir des difficultés à m'y accoutumer...

Cela vient de se passer il y a quelques jours, au cœur de la bataille contre les samurai Torayama. Une bataille dont le début fut abrupt, le Tigre ayant décidé de venir nous déloger à l'entrée même de notre Kyuden, au bord du grand lac qui protège notre cité en la ceignant comme un écrin.
Shunbin-sama avait pourtant décidé que celle-ci aurait lieu plus tard : de glorieux mariages devaient être fêtés avant cela, des samurai de tous clans devaient se déplacer jusque nos terres pour y participer et ensuite soutenir l'effort shogunal afin de remettre les trop fougueux Torayama à leur place après leurs dernières incartades.
Si au fond de moi je comprends cette décision de leur part, celle de ne pas avoir attendu ce qui aurait par trop ressemblé, de leur point de vue, à une exécution, j'ai pour l'instant beaucoup de mal à l'accepter. Nous vivons pour notre clan, nous vivons pour protéger notre honneur, nos valeurs, nos terres, ce en quoi nous croyons, nous vivons pour servir notre maître. Nous mourons pour cela aussi. Parce que nous sommes des samurai et que telle est notre destinée... Certes.
Mais tant de frères, d'amis, sont morts...
Ce n'était pas mon premier combat. Ce n'était pas ma première bataille. Ce n'étaient pas les premiers décès que je vivais. Mais ceux-ci ont eu un goût particulièrement amer.
Ces pertes ont eu lieu parce que les choses ne se sont pas déroulées comme nous l'avions prévu.
Comment avons-nous réellement pu penser que le Tigre se contenterait d'attendre sagement que l'armée shogunale se déplace jusqu'à lui? Quelle erreur.

Nous avons à peine eu le temps de nous organiser : les nouveaux équipements n'avaient pas encore été achetés et nous n'avions plus le temps d'aller nous les procurer ; toutes les troupes qui devaient participer à la bataille n'étaient pas encore présentes ; la stratégie a été élaborée en chemin, alors que nous nous réunissions à l'entrée de Kyuden Karasu et les positions de chacun ont également été décidées à cet instant.
C'est dans ce climat que nous nous sommes rendus au bord de notre lac où nous attendaient déjà les Torayama.
C'est ainsi que tout à commencé.

Nous étions trois Shûno du clan Karasu à diriger les opérations, à réunir Kitsune, Seigikami et Saru sous la même bannière.
Trois Shûno.
Et je suis le seul à avoir survécu...
C'est probablement le rôle que j'ai tenu dans cette bataille qui m'a permis d'en voir la fin. L'endroit où je me trouvais également. Sur les bords du lac, loin du centre de la mêlée, de là où se sont entretués nombre d'ashigaru et de samurai, nous nous tenions, Fusui, Shugenja et archers, réunis par un même objectif et sous mon commandement.
La tactique était simple pour nous : abattre les Fusui adverses avant que l'assaut ne soit lancé. Nous savions qui elles étaient. Nous savions combien elles étaient. Nous avions plus ou moins une idée de leur maîtrise. Ne restait plus qu'à les localiser dans la masse compacte des troupes et samurai qui s'alignaient et s'organisaient en vue du choc initial.
Ce ne fut pas long.
L'une après l'autre elles sont tombées, fauchées par le feu et le vide. N'en restait qu'une seule à n'avoir pas fait les frais de nos attaques combinées, ainsi qu'un tout jeune Shugenja.

C'est lorsque le vrai combat a débuté que les choses se sont gâtées. Des ashigaru ont fuit le champ de bataille, probablement apeurés par la puissance du Tigre. Nombre d'entre nous ont trouvé la mort ou l'inconscience face aux sabres de commandants Torayama particulièrement expérimentés.
Bref, ce qui aurait dû être une bataille remportée d'avance ne l'était finalement pas... Notre supériorité numérique ayant été engloutie en peu de temps.

Les combats se sont succédés, les assauts également. L'odeur du sang était partout, la folie et la frénésie aussi. Certains se sont laissés emporter par trop dans cette fièvre, commettant des actes qu'ils ont été contraints de regretter amèrement par la suite. Des blessés, ou des morts, gisaient au sol alors que des cris résonnaient dans les airs.
Des combats.
Encore des combats.
De la souffrance.
De la bravoure.
Le tout réuni en un tourbillon destructeur qui frappait les uns et épargnait les autres sans qu'on en comprenne la raison. Le tout formant un chaos qu'une vie ne suffirait pas à effacer des mémoires.
Combien de fois ai-je dû crier des ordres en constatant qu'un des nôtres allait tomber? Combien de fois ai-je demandé aux Fusui et Shugenja toujours en vie de s'occuper des blessures reçues par nos alliés? Combien de fois me suis-je détourné moi-même de mon propre combat pour tenter de soutenir un vaillant samurai qui manquait de plier sous les coups reçus?
À vrai dire je n'en sais rien.
Tout ce que je sais, c'est que je n'ai été capable de soutenir ni Kagetoki-san, ni Gisei-san.
Je n'ai pu que les regarder s'écrouler.
Je n'ai pu qu'espérer les voir se relever à la fin de la bataille.
Je n'ai pu que reprendre le commandement de l'armée shogunale.
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyVen 30 Avr - 21:17

Cinquième feuillet

S’il y a une chose plus horrible qu’une bataille, c’est bien la fin d’une bataille…
C’est une constatation qui m’a déjà frappé auparavant, et je crois que mon avis ne divergera jamais sur ce point.
Durant les affrontements, les pensées et considérations autres que celles pouvant mener à la victoire sont effacées. Le sabre seul importe. La direction des troupes aussi. Les ordres… Les tactiques. Tout se succède à une telle vitesse dans l’esprit qu’il n’est pas rare, par la suite, de ne plus se souvenir avec exactitude de ce qui s’est produit à moins de faire un considérable effort de mémoire.
Je le sais.
Je l’ai vécu plusieurs fois.
Et cette bataille contre les samurai Torayama n’en fut encore une fois que la confirmation.
On ne prend pas le temps de réfléchir : on agit.

Mais lorsque tout est fini. Lorsque la frénésie a pris fin, que les hommes cessent de se battre et qu’un vainqueur est désigné… Que reste-t-il ?
La mort… Oui. La mort et la douleur.
La douleur physique, celle laissée par les blessures, les coups et la fatigue qui s’abattent alors brusquement sur les organismes mis à mal qui prennent le temps de se rendre compte, enfin, de leur piteux état. Mais la pire de toute est sans conteste la douleur morale, celle qui déchire les entrailles mieux que n’importe quelle lame, fût-elle forgée par un maître.
Du moins c’est comme ça que je le vis… À chaque fois.
L’angoisse de ne pas apercevoir certains de mes frères parmi ceux qui se tiennent encore debout, celle de ne pas réussir à retrouver leurs corps lorsque mes yeux se posent enfin réellement sur tous ceux qui sont tombés, celle de les retrouver mais de ne rien pouvoir faire pour eux… Et enfin, le sentiment d’échec et de perte que l’on éprouve lorsqu’on est obligé de renoncer… Renoncer à eux, renoncer à s’acharner.
Voilà ce que je ressens dans ces moments-là.
Et quand je me demande si je suis le seul à éprouver cela, il me suffit d’observer certains samurai perdus, hagards, qui comme moi cherchent des survivants. Et je sais que ce n’est pas le cas.
Toutes les batailles sont différentes… Mais leur terme reste immuable.
Et celle que nous venons de vivre n’a pas échappé à cette règle. Elle a eut son lot de mort.

En tant que seul officier encore debout du clan Karasu, il est évident que je n’ai pas pu me laisser aller. J’ai donné des ordres pour que les blessés soient soignés, quel que soit le clan auquel ils appartenaient car c’était là quelque chose qui n’avait plus aucune importance. Puis, sans prendre le temps de me remettre moi-même, j’ai appliqué mes propres directives.

Comme je l’ai déjà dit sur le feuillet précédent et comme tout le monde le sait, ni Kagetoki-san, ni Gisei-san n’ont survécu. Je n’ai pourtant mis que peu de temps à les retrouver, ne m’arrêtant en chemin que pour essayer de ranimer l’une ou l’autre fusui qui pourrait nous aider dans notre tâche. Je savais où ils se trouvaient… C’était là une des rares informations qui s’était imprimée durablement dans mon esprit alors même que la bataille faisait rage.
J’ai fait tout ce que j’ai pu pour Kagetoki-san. J’ai tout donné pour soigner les profondes blessures qui balafraient son corps et pour stopper cette hémorragie qui ne faisaient que l’emporter plus loin sur le chemin du Meido, j’ai offert des parcelles de ma propre vie au Dragon du Feu pour accentuer sa puissance, lui transférant tout ce que je pouvais lui donner du peu d’énergie qu’il me restait… Mais rien n’y a fait.
Une partie de moi n’avait jamais voulu croire que mon ami de toujours puisse mourir un jour, pas lui... Et certainement pas avant moi. C’était quelque chose d’inconcevable… C’est pourtant ce qui est arrivé.
Exsangue, Kagetoki-san a cessé de respirer ce jour-là.
Quant à Gisei-san, j’avais chargé mon kohai de s’occuper de lui… Il n’eut malheureusement pas plus de succès que moi dans ses efforts pour ramener le jeune général à la vie malgré un acharnement sans doute aussi grand que le mien, sinon plus puisqu’il ne semblait pas encore avoir conscience de la mesure exacte, celle de l’instant où tout soin devenait inutile. C’est un apprentissage que j’aurais voulu ne jamais avoir à lui transmettre.
Gisei-san, un bushi prometteur déjà doté d’un grand sens tactique, s’est donc aussi éteint ce jour-là. Pour être appelé aussi jeune par ses ancêtres, il me semble que c’était certainement parce que c’était là que se trouvait son destin… Et que ceux-ci avaient dû être particulièrement fiers de lui.
Je ne vois que cette seule explication.

Bien sûr il y eut d’autres samurai qui, eux, se relevèrent et j’avoue que cela m’a mis un peu de baume au cœur. Voir des corps que l'on pense déjà emportés par la mort tressaillir et réagir aux pouvoirs des Dragons est un soulagement réel. Et c’est parce qu’il y en a toujours pour se relever que nous trouvons, Fusui et Shugenja, la force à chaque fin de bataille de surmonter notre propre fatigue pour tout donner à les sauver.
Mais les pertes restent là… Jusqu’à être emportées loin de nos yeux par les flammes d’un bûcher.
Et même ainsi, elles demeurent comme autant de cicatrices en nos âmes.

Mais le plus ironique dans tout cela, c’est certainement que c’est en constatant l’énergie que j’avais déployée ce jour-là et les jours suivants pour remettre de nombreuses personnes d’aplomb, au mépris de ma propre vie, que les sorcières de notre Académie ont enfin consenti à me reconnaître digne de porter l’insigne des tenkai.
Après tant de temps et d’étude…
Leur fallait-il vraiment bien un événement comme cela pour enfin se décider ?
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyMar 31 Aoû - 19:23

Sixième feuillet

Depuis la fin de la bataille, depuis que le bûcher qui a brûlé les corps des samurai tombés et emporté leur âme vers le Meido s'est entièrement consumé, depuis que les cendres reposent dans nos jardins au côté des innombrables guerriers disparus au fil des années, la vie a repris son cours à Kyuden Karasu.
Au vu des récents événements, le mariage de notre Seigneur, Shunbin-sama, a forcément été retardé, reporté à plus tard... Seul l'avenir nous dira quand. Laisser le temps à tous de se remettre des stigmates de la bataille, que ce soit aux samurai ou bien, d'un point de vue plus matériel, au clan lui-même qui a été mis à mal, ébranlé dans son entièreté... Voilà l'objectif du moment.
Nous remettre.
Certes, nous avons gagné la bataille.
Certes, la victoire fut décernée à la coalition que nous avions formée en rassemblant autour de nous les autres clans de l'Empire, à l'exception des Kuma qui étaient restés sur leurs terres pour continuer de nous protéger tous des incursions de l'Ombre. Mais le Tigre n'est pour autant pas un adversaire facile à mater et les pertes furent bien plus conséquentes que prévues. Pour tous.

En tant que Shûno du clan, la tâche qui m'incombe est donc rude et m'absorbe la plupart du temps. Ce n'est qu'occasionnellement, comme en cet instant, que je trouve le temps pour rédiger quelques lignes dans ce carnet, pour me concentrer un peu sur moi-même.
Il y a tant à faire.
Mais je ne suis pas à plaindre. Après tout, malgré mon grade, je ne suis qu'un exécutant. C'est avec zèle que j'obéis aux ordres et que je les fais respecter, il est vrai. Des initiatives j'en prends également... Un maximum. Et mes journées commencent donc tôt, très tôt, pour ne se terminer que tard. Il faut tout coordonner : les hommes, les diverses missions, les jeunes qui rejoignent nos rangs, l'achat de nouveau matériel lorsque les finances le permettent, les entraînements, les relations avec les autres clans... Les jours se suivent en rangs serrés, passent à une telle vitesse que parfois j'arrive même à oublier, l'espace d'un instant, à quelle date exacte nous sommes.
Tout s'enchevêtre et s'emmêle. C'est une frénésie sans précédent qui agite en ce moment notre clan. Mais s'il y a au moins un aspect positif à cela, c'est qu'elle m'empêche de trop penser... Ou en tout cas qu'elle m'empêche de penser à autre chose qu'à mon devoir.
Cela fait une éternité déjà, il me semble, lorsque je peux prendre le temps de regarder en arrière, que j'ai perdu des amis, des frères.
Au moins n'y a-t-il plus de douleur.
Le vide s'est comblé, rempli par ce sentiment d'indéfectible Loyauté que je voue à Shunbin-sama, à Karasu, à tous les samurai que je côtoie. Il a toujours été là. Mais il s'est renforcé. Je le sens.
C'est pour eux que j'existe.
Puisque le Destin, les Kami, ou quoi que ce soit qui ait intercédé en ma faveur, m'ont laissé la vie, je continuerai à l'offrir à mon clan. Sans faillir. Sans douter. Sans me ménager. Plus que jamais.
Tant que l'on aura besoin de moi, autant que je le pourrais, jusqu'à mon dernier souffle, je serai là.

Et ce serment que je me fais à moi-même est d'autant plus vrai et plus fort que j'ai l'impression que Shunbin-sama est plus affligé que jamais par la double charge qui est sienne.
Diriger l'Empire, diriger Karasu... C'est une lourde tâche. D'autant plus pour l'instant, alors qu'il y a tant à faire.
Je m'inquiète pour mon Daimyo. Je m'inquiète pour le Shogun.
Je m'inquiète pour l'homme qui incarne ces deux icônes de l'Empire à lui seul.
Et, plus que tout, j'espère que cette appréhension est infondée.
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyMer 6 Oct - 12:01

Septième feuillet

Elle ne l'était malheureusement pas...
De nouveau Karasu se retrouve endeuillé. Et pas par n'importe quelle perte : celle de Shunbin-sama, guide spirituel de l'Empire tout autant que notre Daimyo respecté.
Ces années, décidément, s'avèrent bien difficiles.
Et c'est à moi qu'il incombe désormais de faire en sorte que le clan les affronte la tête haute.

J'avoue que, malgré mon rang, malgré la position que j'ai occupée auprès de Shunbin-sama, malgré le fait que ces années passées à servir Karasu, au contact de vaillants samurai, m'ont vu m'endurcir considérablement... Malgré tout cela, oui, mon étonnement fut grand lorsque les Anciens me firent part, ce jour, de leur décision de me nommer Daimyo.
Peut-être, tout compte fait, reste-t-il encore au fond de moi un peu de cette incertitude qui m'a si longtemps caractérisé. Cette incertitude qui m'a trop longtemps empêché d'avoir la confiance nécessaire en mes capacités et que je pensais pourtant avoir balayée, effacée, depuis que j'occupais ma place de Shûno.
Étais-je donc encore si faible ce matin?
Le suis-je encore à présent?
Je veux croire que non. Sinon pour quelle raison ces conseillers avisés qui, déjà, avaient élevé Shunbin-sama à ce rang avant moi, et leurs prédécesseurs d'autres illustres Daimyo encore avant, m'auraient-ils choisis?
Bonne question en vérité.
Il ont vu en moi les qualités nécessaires, c'est là ce qu'ils m'ont annoncé. Rien de plus. Et, à vrai dire, c'est là tout ce que j'ai réellement besoin de savoir si l'on y pense.
Je m'interroge pourtant. Je ne peux m'en empêcher. Je crois que c'est là une chose contre laquelle je ne pourrais jamais lutter, celle que je ne pourrais jamais chasser de ma nature même, quels que soient mes efforts. Il me faut remettre en question, sans arrêt. Chercher à comprendre. J'ai besoin de savoir et de connaissances.
De causes et de conséquences.
Et ce qui est certain, c'est qu'il y en a eu, sans aucun doute, pour guider le choix vers moi alors que d'autres auraient peut-être également pu convenir. Mais je ne les connaîtrai pas...
À moins que ce ne soit justement cela qui ait guidé les Anciens : mes questionnements, mes raisonnements.
Et cette indéfectible passion que j'éprouve pour mon clan. Celle qui ne faiblit pas, jamais. Pas même maintenant alors que je suis partagé entre la fierté de me voir attribuer de si nobles fonctions et la crainte de ne pas réussir à me montrer à la hauteur.
Ce doit être cela. Et peut-être d'autres choses encore.

Mais quoi qu'il en soit, dès à présent, à la minute où j'écris ces lignes, je vais faire en sorte d'effacer mon appréhension.
Car il me faut avoir confiance dans le jugement des Anciens. Me préparer à cette succession, à l'annonce qui sera officiellement faite demain et mettra au courant chacun des samurai qui constituent Karasu. Garder la tête froide. Trouver les mots justes qui me permettront de prendre mes nouvelles fonctions et rassurer tout le monde sur l'avenir du clan.
Rassurer, oui. Tenter de panser les plaies à vif que nous ont laissées les dernières pertes. Mais tout à la fois faire en sorte que Karasu conserve sa place dans l'Empire.
C'est cela que je dois faire. C'est sur cela que je dois me concentrer. Plus que jamais je me dois de servir Karasu.
Plus encore, je me dois d'être Karasu. L'incarner. En devenir l'image même.

Je suis Karasu Kagehisa.
Demain, je serai Daimyo.
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyVen 29 Oct - 10:06

Feuillets en surplus

*Insérées entre les feuillets du journal, quelques pages disparates sont placées, certaines abîmées, froissées, malmenées, comme n'appartenant pas réellement à ce carnet. Aucune date ni aucune indication ne permet de réellement savoir où celles-ci se placent dans la chronologie des événements jusque-là relatés. Probablement seul Kagehisa lui-même aurait réponse à cela...*


Meurtrissures nées de l'hiver.
À ta douce chaleur,
Le voilà, c'est le dégel.



J'ai bien peur de m'être épris de cette femme.
Mes obligations. Mon statut. Tout m'empêche de la voir. Pourtant je la retrouve aussi souvent que je le peux.
Je ne devrais pas.
Mais elle est comme un baume. Un remède aux tracas quotidiens. Sa présence suffit à alléger mon âme.


C'est un joli prénom pour une magnifique petite fille... Seiko.
À défaut de pouvoir être son père aux yeux de tous, je le lui offre.
Trop de choses nous séparent, sa mère et moi.
Mais je veux qu'elle ne manque de rien. Qu'aucune des deux ne manque de rien.
J'y veillerai personnellement.


Plus que jamais les barrières se dressent.
De plus en plus ma condition voudrait que je m'éloigne d'elles. Il est vrai qu'il le faudrait. Si cela venait à s'apprendre... Mais je ne peux m'y résoudre. Les ponts sont presque coupés. Je ne les vois que très rarement et toujours fugacement. Toutefois je ne peux aller plus loin.
Je veille sur elles à une distance respectable.
Je le savais qu'une telle relation ne pourrait m'apporter que des tracas. Mais je ne regrette rien. Et je refuse que cette erreur de ma part rejaillisse sur elles. Aucune des deux n'est responsable de mes égarements.


Bientôt, déjà, Seiko sera en âge de recevoir une éducation.
Je ferai en sorte qu'elle reçoive celle des samurai. Elle apprendra l'honneur. Elle apprendra les valeurs de Karasu. Elle les défendra.
Je n'ai rien décelé de mon don chez elle. Mais cela ne fait rien. Elle suivra sa propre voie, voilà tout. Elle la choisira. Et ensuite elle viendra rejoindre les rangs de ceux qui servent Karasu.



Plus le temps passe, plus je me rends compte que le secret de ses origines sera compliqué à garder. Elle me ressemble. Je ne suis pourtant qu'un étranger pour elle, ou presque : nous nous évitons mutuellement. Toutefois je retrouve certains de mes traits dans cette enfant. Mon sang coule dans ses veines, cela devient de plus en plus indéniable. Mais bientôt cela n'aura plus d'importance. Son gempukku passé, elle sera une samurai-ko accomplie.
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyDim 31 Oct - 0:38

Huitième feuillet

Cela fait des années que je n'ai plus grimpé ces montagnes.
Et je les déteste toujours autant...
Ce n'est pas tant la marche ou l'altitude. Cela m'incommode peu... À force de monter et dévaler les escaliers de Kyuden Karasu, bien qu'ils n'aient aucune mesure de comparaison avec ces flancs escarpés, on finit par s'accoutumer à forcer sur les jambes, à gravir les pentes.
Ce n'est pas non plus le paysage qui, à vrai dire, est magnifique. La vue, que l'on a sur les plaines qui s'étendent en contrebas, lors de l'ascension, laisse presque croire à l'infinité de notre Empire pourtant entouré par les flots. Flots que l'on aperçoit d'ailleurs également, lorsque les pics rocheux ou la brume dont ils s'entourent le permettent, en une flaque d'une mouvante brillance venant se fracasser sur les terres.
Et là-bas, comme en écho, le lac ceignant ma Cité.

Non, c'est le froid, tout simplement. Ce froid insidieux qui pénètre jusqu'au plus profond des chairs malgré les vêtements, malgré les feux que l'on peut allumer pour se réchauffer. Ce froid provenant de ces neiges éternelles qui couvrent tout de leur manteau blanc, aussi épais que glacé.
Celui-là, je ne le supporte pas. Pas plus que cette poudreuse dont il émane, dans laquelle les pieds s'enfoncent et sous laquelle ils risquent de se poser sur une pierre glissante, invisible à l'œil nu. Quand il ne s'agit pas de congères...

Au moins étais-je prévenu cette fois-ci. Pas comme cette première fois où, cherchant après un groupe de bandits qui avaient tentés de s'en prendre aux Torayama, nous avions poussé notre exploration jusqu'à ces lieux glacés sans aucune préparation et rien d'autre à nous mettre que les vêtements que nous portions déjà sur nous... Ceux-ci qui n'étaient clairement pas taillés pour le froid que nous avions trouvé.
Je me souviens encore comme Takao-san et moi-même faisions pâle figure. Alors que Kagetoki-san, lui, parvenait à entretenir l'illusion qu'il n'était pas incommodé par cet environnement hostile. Cela fait au moins un souvenir amusant de cette aventure qui ne s'est soldée que par de nombreuses heures perdues, des membres engourdis, ainsi qu'une visite tout de même intéressante du Temple des quatre Vents.

Mais moi qui entretiens tant mon affinité avec le feu, je ne me sens clairement pas dans mon élément ici... Ce qui est encore un euphémisme.
Je ne comprends pas comment les Saru peuvent vivre dans ces montagnes. Et je ne comprends pas plus comment Fubuki-sama n'a pas encore décidé d'établir sa cour ailleurs qu'en son Kyuden bien trop éloigné de toute civilisation.
Comment pourrait-il seulement être au courant de ce qui se passe dans l'Empire en étant perdu au milieu de nulle part? Là où n'importe quel messager mettrait qui plus est un temps fou à arriver...
Au moins, cela serait peut-être une explication logique à la nouvelle répartition des taxes qui vient d'être portée à la connaissance de tous les Daimyo : l'ignorance, due à la position excentrée que ce Shogun occupe sur les terres impériales.
À vrai dire... Je préférerais nettement une telle explication à n'importe quelle autre.
Car cela ne remettrait pas en cause le choix qui a été fait de le placer à la tête de l'Empire.
Car cela pourrait être facilement réparable.
De toute façon, je connaîtrais bien assez tôt la réponse à cette question. Elle se résoudra d'elle-même lorsque je serai en sa présence. Mais pour cela, il faudra tout d'abord terminer l'ascension des montagnes : atteindre le Temple des quatre Vents dans un premier temps, puis prendre le chemin qui mène au Kyuden Saru.
Rien que d'y penser...
Mais au moins suis-je en compagnie d'un samurai de qualité, ce qui rend la route moins pénible.

Un seul samurai et quelques serviteurs. Voilà qui peut sembler peu pour constituer l'escorte d'un Daimyo. Il est vrai. Mais Nodoka-san est parfaitement taillé pour assurer, seul, ma protection. J'ai toute confiance en lui.
De plus, j'avoue ne pas encore m'être tout à fait accoutumé à être sans arrêt entouré et protégé. À la fois le centre de toutes les attentions et de toutes les inquiétudes. J'ai plus souvent été yojimbo qu'à mon tour... Et à présent, je me retrouve dans la situation inverse, bien que je sois loin d'être sans défense.
Enfin, après tout, nous sommes censés retrouver d'autres de mes hommes là-bas. Koshiro-san et son épouse. Partis plus tôt, selon ma volonté, pour rattraper leur erreur grossière : celle d'avoir mis un terme à la vie de Kara-san alors qu'il venait d'obtenir un titre particulièrement important, et infiniment intéressant pour Karasu. Qu'il y ait eu des griefs entre eux, je ne le remets certes pas en cause et cela m'importe peu tant que ceux-ci ont été réglés honorablement.
Toutefois, le bien du clan aurait dû primer sur le bien personnel...

Mais quoi qu'il en soit, leur présence gonflera mon escorte et nous formerons ainsi une délégation proprement dite... Digne de se présenter devant le Shogun.
Puissions-nous donc arriver bientôt, que je me ménage enfin une opinion sur notre dirigeant actuel et que nous quittions ces étendues neigeuses.
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyVen 5 Nov - 2:11

Neuvième feuillet

À croire que les Kami entendent mes demandes : le voyage dans les montagnes s'est trouvé écourté puisque, lors de notre ascension, Nodoka-san et moi-même avons croisé la route de Zaraki-san, le Daimyo Kuma... Et désormais Chokumei d'après ce qu'il m'en a dit avec un fier empressement...
Celui-ci nous ayant obligeamment fait part de la venue prochaine du Shogun au Temple des quatre Vents, notre voyage s'est interrompu là.
Il n'était nul besoin de pousser plus loin.

Nous attendons donc. Et nous ne sommes pas les seuls puisque la Karo Kitsune, Asami-san, est également là. De même que quelques Saru plongés dans de longues méditations dont il est difficile de les faire sortir.
Nous attendons donc. Tuant le temps en conversations ou en contemplation des lieux.
Pour ma part, je l'ai déjà mentionné, j'ai eu auparavant l'occasion de visiter cet endroit, d'admirer les autels dédiés à chacun des Vents, de profiter du calme apaisant de la bâtisse. Le mysticisme qui se dégage de ces murs m'intéresse et m'attire. Comme à peu près tout ce qui relève de la spiritualité à vrai dire...
Nous attendons donc. Et le temps aurait pu finir par paraître long, tant Fubuki-sama semble exceller dans l'art de se faire désirer, si Zaraki-san n'avait décidé de prendre à cœur ses nouvelles fonctions. Ceci en faisant preuve d'un tel entrain et d'un tel investissement que cela n'en fut qu'encore plus louable de sa part...

Malheureusement, la bonne volonté, seule, ne suffit pas à remplir efficacement un rôle tel que celui de Chokumei... Et les idées que Zaraki-san semble se faire sur son statut fraîchement acquis me paraissent toutes plus erronées les unes que les autres.
Il est hors de question de le laisser s'immiscer dans l'organisation même du clan Karasu, d'imposer un mode de fonctionnement à la rigueur militaire toute Kuma à mes samurai ou même de suivre des directives aussi saugrenues que de soumettre chacun de mes hommes, même ceux dont la guerre n'est pas le centre d'intérêt, au port d'armures lourdes.
Rien de tout cela n'est de son ressort.

Toutefois, j'ai la désagréable impression qu'il n'a guère compris l'expression de ma profonde réticence et qu'il a pris ma vague réponse pour un assentiment à l'égard des projets qu'il nourrit... À moins qu'il n'ait décidé de passer outre en pensant qu'il dispose d'assez de force, d'influence, de pouvoir ou que sais-je encore d'autre pour contraindre le Corbeau à courber l'échine devant lui?
Ce serait là une grave erreur de sa part.
Mais après tout, s'il désire se complaire dans l'illusion, ce n'est pas mon problème. Celle-ci se brisera bien assez vite d'elle-même...

Quoi qu'il en soit, à la suite de cette intermède, agrémenté de l'arrivée de nouveaux samurai venant grossir notre assemblée, nous avons repris notre occupation première.
À l'heure où j'écris ces lignes, nous attendons donc toujours la venue du Shogun...
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyLun 29 Nov - 1:59

Dixième feuillet

Bien que le trajet du retour, effectué en compagnie d'Akatsuki-san et d'Hanabi-san, aurait pu être qualifié d'agréable, je dois avouer que j'étais bien trop préoccupé pour réellement en profiter.
Et préoccupé, je le suis toujours.
Depuis le déroulement de ces multiples entrevues au Temple des 4 Vents, la même question revient sans cesse me tourmenter : « Que devient l'Empire? »
Si celle-ci n'était qu'une simple question anodine, ce ne serait rien : il me suffirait d'occuper mon esprit à autre chose pour la reléguer au second plan où elle finirait par être oubliée. Mais malheureusement elle est le reflet d'une sourde inquiétude qui m'habite et refuse de me quitter ces derniers jours, seul résultat de mes investigations politiques.

Je suis monté là-bas, soucieux de comprendre le pourquoi de ces nouvelles taxes imposées à mon clan tout autant que désireux de les voir s'alléger pour notre bien économique, les dernières crises nous ayant laissés exsangues, incapables de renouveler nos équipements malmenés et incapables de payer la solde de l'ensemble de nos troupes. Je souhaitais également faire la connaissance de ce Shogun que je n'avais que peu côtoyé jusqu'alors...
Mais tout ce que j'ai gagné à effectuer ce voyage, c'est cette interrogation douloureuse.

Il est certainement blasphématoire pour un samurai, un Daimyo qui plus est, d'avoir des pensées critiques envers celui qu'il devrait suivre et respecter comme étant son Seigneur. Il est donc à espérer que jamais ces notes ne parviendront entre les mains de personnes malintentionnées... Bien que, en fait, je ne pense pas avoir réussi à donner le change à celui que je me dois d'appeler Fubuki-sama quant à ce que sa personne m'inspire... Il est encore des situations et émotions qui parviennent à briser la retenue que je m'emploie à conserver en tous temps.
L'homme que j'ai découvert, s'il est en effet possible qu'il soit tout à fait qualifié pour diriger une bande de moines vivant reclus, ou presque, dans les montagnes, n'a pas l'étoffe de gouverner l'Empire : ses connaissances en matière de finances semblent encore plus lacunaires que les miennes, moi qui n'ai jamais eu à m'en soucier auparavant, laissant cela aux commerçants, à Shunbin-sama ou à toute autre personne dont le rang les obligeait à s'intéresser à ces considérations triviales. Et je gage également que l'amitié manifeste qu'il semble entretenir avec le clan Kuma est en grande partie responsable du transfert de la presque totalité de nos richesses dans les caisses de l'Ours, tout autant que son refus de comprendre que la situation florissante de Karasu a été laissée derrière nous par les retombées successives de la guerre et de la perte du Shogunat.
Entre la dissolution annoncée de deux de nos troupes par un héraut chargé de recenser l'impact des taxes sur l'ensemble de l'Empire et mon propre témoignage pour lequel je me suis déplacé en personne... Que lui faudrait-il de plus pour comprendre que ce qu'il prétend être une somme suffisante pour vivre ne suffira pas à nos besoins actuels et qu'il précipite Karasu à sa ruine?
Renforcer les défenses des frontières de l'Empire en leur octroyant plus de moyens est certes un but louable, mais si cela passe par l'appauvrissement de l'intérieur de ses terres, où se situe donc l'avantage?
Quant à son attitude, que ce soit à mon égard ou de façon plus générale, mieux vaut que j'évite même d'y songer à nouveau tant elle ne sied guère à son rang. De plus, au vu de ses remarques et de ses réactions face à mon statut de Tenkai, il est au moins indéniable que le sang des membres du clan Ryushin est bien présent en ses veines.
Ce qui n'arrangera certainement rien à une relation qui vient déjà de se révéler très précaire...

Je sais, en écrivant ces lignes, que je me montre particulièrement intransigeant envers cet homme. Mais la place qu'il occupe me force à une telle rigueur.
Être Shogun n'est pas chose aisée, j'en conviens bien aisément, et je sais pour avoir côtoyé Shunbin-sama à quel point, lorsqu'on se dévoue entièrement à sa tâche, celle-ci peut être exigeante. Mais ce Daimyo Saru, promu au rang de dirigeant de l'Empire, n'est pas à la hauteur de l'immense honneur qui lui a été fait... C'est là mon intime conviction.
Peut-être pourrait-il le devenir. Peut-être pourrait-il se rendre compte des erreurs qu'il vient d'ores et déjà de commettre et apprendre de celles-ci... Malheureusement, la situation actuelle ne nous octroie pas le loisir d'attendre qu'il s'accoutume à ses nouvelles fonctions.
L'Empire a besoin d'un pouvoir fort, et stable. Maintenant.

Ainsi donc, avec un tel Shogun, un Chokumei Kuma qui se croit en droit de diriger l'ensemble des clans à sa guise, un clan Seigikami qui n'est pas prêt de renouer avec la magistrature et mon propre clan, pourtant depuis toujours symbole de pouvoir et de stabilité, placé en mauvaise posture par ces soucis financiers qui nous sont imposés, comment ne pourrais-je pas être harcelé par cette question?

Que devient donc l'Empire...?
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptySam 8 Jan - 1:49

Onzième feuillet

Je ne peux pas dire que je sois à compter au nombre de ceux qui pleurent la mort de Zaraki-san.
En revanche, je dois avouer goûter particulièrement à l’ironie qui baigne les circonstances de sa disparition… Aussi mesquin cela puisse-t-il paraitre.

Cela fait longtemps à présent que nous, Karasu, avons connaissance de l’existence d’un groupe de bandits se terrant dans le Bois des Saules. Régulièrement, nous les combattons pour leur faire passer l’envie de s’en prendre tout autant aux habitants des villages environnants qu’aux voyageurs malchanceux.
Mais jamais, encore, nous n’avons réussi à les déloger de leur cachette : le bois est dense et mes hommes ont mieux à faire que de se mobiliser entièrement pour en ratisser chaque centimètre à la recherche du repaire de ces marauds.
Une solution, radicale, aurait peut-être pu venir à bout de cette engeance… Mais bouter le feu à des hectares de forêt n’est guère une activité que j’affectionne, surtout lorsque ceux-ci abritent en leur sein des ressources aussi précieuses et inégalables que le bois de magnolia dont nos artisans se servent pour confectionner des armes de grandes qualité. Prendre le risque de perdre une telle manne étant chose inconcevable, nous nous sommes accommodés de la présence pourtant irritante de la vermine y ayant élu domicile tout en la réprimant consciencieusement… Du moins jusqu’à ce que Zaraki-san décide de se mêler de ce qui ne le regarde pas.

Dans le souci de ménager ses velléités, tout en me ménageant le temps d’essayer de le raisonner une dernière fois, avant de passer à des mesures plus radicales destinées à lui faire comprendre que son titre ne lui permettait pas de diriger l’organisation des terres autres que les siennes, j’ai décidé de dépêcher deux enquêteurs au Bois des Saules.
Leur mission était simple : tenter une ultime fois de dénicher le repaire des bandits.
Je m’attendais à ce que ces recherches soient un échec, ce qui m’importait peu à vrai dire, j’ai pourtant été surpris par la tournure que prirent les événements.

Takashi-san, hitokiri de son état mais désireux d’embrasser la carrière de Hanji, avait apparemment réussi à s’approcher d’assez près du camp des marauds pour les affoler et provoquer leur courroux.
C’est lui-même, au mépris de ses blessures, qui est venu nous avertir de la situation alors que nous nous trouvions, Masahito-san et moi, à Shiro Banken, de retour d’une cérémonie de mariage à laquelle nous avions été conviés.
Trop peu de samurai étaient présents dans le bois pour faire face à l’entièreté de la bande de voleurs qui s’y trouvait. Même avec la puissance de Zaraki-san dont j’appris alors la présence à leur côté.

Ce qu’il faisait là, je ne le sais. Et probablement n’en aurais-je jamais connaissance puisque Takashi-san n’en sait visiblement pas plus, et qu’aucun Ours n’était alors là pour accompagner son maître.
Tout au plus puis-je supposer qu’il avait voulu vérifier, de la même façon qu’il l’avait fait auparavant avec le clan Kitsune, que Karasu suivait ses directives… Ce qui, en plus du fait qu’il faisait route parfaitement seul, sont les seules circonstances qui l’ont mené à cette mort peu glorieuse dont l’Empire tout entier a désormais eu vent.
Car l’unique chose que l’on pourrait me reprocher dans cette histoire serait d’avoir mis trop de temps à porter secours à mon homologue une fois averti de la situation périlleuse dans laquelle il se trouvait.
Et je sais que de nombreux esprits touchés par l’affliction, en quête d’un coupable, préfèrent d’ores et déjà cette interprétation des événements à celle que je pourrais leur en faire si j’éprouvais le besoin de me justifier à leurs yeux… Celle que je viens de coucher sur le papier. Celle à laquelle je pourrais ajouter qu’en plus de la fatigue du voyage, nous avions combattu un groupe de heimin mécontents, poussés par la faim, aux portes de notre forteresse…
Mais j’ai conscience que de telles explications seraient prononcées en vain.
Alors peu m’importe.
La roue du Destin, les Kami, ou que sais-je d’autre, m’ont ôté une épine du pied tout en m’évitant bien des tracas.
C’est bien cela tout ce qui compte.
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyLun 17 Jan - 18:48

Douzième feuillet

J’ai vu de nombreuses choses déjà au cours de ma vie.
Que ce soit des créatures monstrueuses, telles les bakemono, les shikome et autre engeances de l’Ombre… Jusqu’au Ryu no Oni. J’ai assisté à la disparition d’un clan, à son anéantissement pur et simple par les troupes obscures. J’ai participé à moult affrontements d’une violence indescriptible et vu tant d’hommes périr sous mes yeux, à mes côtés. J’ai été témoin de nombreux complots, d’ignobles bassesses de la part de samurai de tous clans…
Mais jamais… Non, jamais, je n’aurais cru un jour devoir faire face à une situation telle que celle qui vient d’ébranler Karasu.

Je n’ai pas de mot assez fort pour exprimer ce que je ressens. Je crois même qu’il n’en existe pas. Tant de sentiments m’ont traversé lorsque j’ai appris ce qui s’était passé, tant m’ont submergé, simultanément, et tant ont continué de jouer avec mes nerfs durant les jours qui se sont écoulés ensuite que je me demande encore comment j’ai pu parvenir à ne pas exploser, à garder mon sang-froid, à faire ce qui devait être fait.
Comme je continue encore à le faire en cet instant.
Je la sens pourtant cette colère, elle brûle en moi à l’image des brasiers qui naissent de ma volonté. Rouge. Incandescente. Cette colère, oui, mais également cette incompréhension qui me ronge ainsi qu’une déception d’une profondeur aussi douloureuse qu’inégalable. Et tellement d’autres choses…

La vie d’un de mes plus fidèles samurai, perdue.
L’image de mon clan, bafouée aux yeux de tous, tout comme ses valeurs.
Les projets patiemment et consciencieusement élaborés, tous irréalisables maintenant. Avortés avant qu’ils n’aient pu porter le moindre fruit.
Les relations et liens tissés avec l’extérieur, précaires désormais.
Tout ça résultant de l’inconséquence d’une seule personne et que je ne peux ressentir que comme une trahison envers Karasu.
Trahison… Quel mot exécrable. Quel concept abject.
Quel gâchis.

Depuis l’annonce de ce qui s’est passé, l’enchaînement d’événements qui en a résulté et mon retour en mes terres, ma tête ainsi que celle de Masahito-san contre toute attente toujours sur nos épaules, rien ne parvient à apaiser la violence des ressentiments qui m’habitent et qui ne demande qu’à se matérialiser… Pas même la mort, devant mes yeux, de cette chose contrôlée par l’Ombre qui se prétendait notre Shogun. Ce qui nous a pourtant plus que probablement sauvé la vie.
Les flammes se sont bien manifestées, plusieurs fois, à mon appel. Mais elles n’étaient pas dirigées contre la bonne personne. Et je n’en ai donc éprouvé aucun soulagement.
Ce n’est pas la vie du fautif que le Dragon du feu a emporté dans ses griffes, mais celle de Kayshin-san qui n’a cessé de me servir fidèlement, jusqu’à son dernier souffle, sacrifiant celui-ci en calomnies dirigées contre moi et contre son clan afin de porter seul le poids de ce que l’on nous reprochait, d’actions qualifiées de crimes et qui auraient pu nous coûter la même mort ignominieuse que la sienne.
Lui qui n’a même pas eu droit à un jugement digne de ce nom, alors que je me dois de mener celui de Kin, à l’origine de tout ce désastre.

Comment peut-on trahir l’un des siens, sans savoir si ses actions, prétendument comprises, ne sont pas le reflet d’une volonté du clan ? Comment peut-en en arriver à dénoncer si facilement ses agissements, à des étrangers, sans même y chercher une signification ou une explication ?
Comment peut-on abandonner un frère de clan pour une amitié entretenue avec un samurai issu d’une autre famille ?
Cela je ne peux le comprendre et ne le comprendrai jamais. Le seul fait de l’imaginer me répugne déjà. Cela n’aurait jamais dû nous arriver, à nous qui érigeons la Loyauté au plus haut de nos valeurs.
Et pourtant…

Le bien du clan doit toujours passer avant le reste, quel qu’il soit. Ceci a toujours été mon intime conviction, issue de mon éducation. Ni la famille, ni les amitiés, pas même notre propre vie ne comptent quand l’avenir de Karasu est mis dans la balance.
Or, de nombreux Corbeaux viennent de se retrouver impliqués dans cette sombre histoire, que ce soit Masahito-san ou moi-même, de par nos positions respectives de Karo et de Daimyo qui nous rendent responsables de l’agissement de nos hommes, jusqu’à d’autres dont le seul crime a été de côtoyer celui sur lequel vient de tomber l’opprobre.
Une vie entière ne suffirait pas à expier pareil crime.
Le seppuku serait châtiment trop doux et honorable.

Il me faut trouver sentence à la hauteur de cette infamie… Mais une telle chose existe-t-elle ?
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyLun 17 Jan - 19:11

*Quelques notes ont été écrites au bas du dernier feuillet, de la main même de Kagehisa, comme tout le reste. Cela ne fait aucun doute, bien que sa calligraphie semble moins appliquée, les caractères plus serrés témoignant de la vitesse à laquelle il a rédigé ces quelques lignes, en complément des ses précédentes réflexions*

Kin est morte.
Sentence a été rendue, mais il semblerait qu’une force bien plus puissante que celle des hommes ait pris pitié d’elle et des tourments qui l’attendaient en guidant la main de Shiawase-san, cousin de Kayshin-san.
Quant au Dragon Rouge, lui qui a trouvé la mort pour Karasu et pour moi, ses cendres reposent désormais, avec ma bénédiction, dans les jardins de notre Kyuden, au côté des plus grands de notre clan.
Seiren-san a su se montrer audacieuse. Grâce à elle, Kayshin-san demeurera auprès des siens.
Puissent ses ancêtres entendre ma voix et apprendre de mes prières que son nom ne lui a été arraché que par un être qui n’était pas réellement Shogun de l’Empire.
Puissent-ils avoir conscience de ma volonté de les voir accueillir ce samurai auprès d’eux.
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MessageSujet: Re: Pensées pêle-mêle   Pensées pêle-mêle EmptyDim 27 Fév - 19:52

Treizième feuillet

Il est aisé, lorsqu’on n’est qu’un simple samurai du rang, d’attirer sur soi la sympathie de ses pairs. Il suffit de peu de chose : un sourire pour chacun, un mot agréable pour tous… Rien que cela. Les bases mêmes de l’amabilité. Sans rapport de force et pour peu que l’on maîtrise assez ces bases que pour éviter tout antagonisme, il n’existe que la fraternité.
Je peux donc dire que, dans ma jeunesse, malgré ma timidité lors de mes premières années au service du clan, j’ai été l’un de ces samurai appréciés de tous… Ou peu s’en fallait.

Toutefois, au fil du temps et une fois monté en grade, il est inévitable que l’on blesse l’une ou l’autre personne par le simple fait que l’on soit obligé de prendre certaines décisions qui s’imposent ou qu’il nous faille remettre à sa place un frère, lui rappeler ses devoirs quand il lui arrive de les perdre de vue ne serait-ce qu’un court instant.
Si l’influence au sein du clan est gratifiante, si porter sur ses vêtements un mon honorifique est source de fierté, il n’en reste pas moins vrai qu’il existe un revers à la médaille particulièrement ingrat.
A cette règle je n’ai pas échappé, malgré la sympathie que j’inspirais.
Est-ce que je le regrette ?
Ce serait mentir que de répondre par l’affirmative à cette question car j’ai toujours eu, et ai encore maintenant, la conviction d’avoir fait ce qui était nécessaire, à chaque fois, quelles que soient les situations auxquelles j’ai dû faire face… Tout comme je sais que jamais je ne regretterai non plus les décisions que l’avenir m’obligera à prendre.
Car les remords sont inutiles. Ce ne sont là que des sentiments qui empêchent l’homme d’avancer, d’accomplir ce qui est nécessaire au moment adéquat à cause d’événements sur lesquels il est pourtant impossible de revenir.
Le passé est immuable. Pas l’avenir.

Shûno, il est donc des samurai que j’ai dû fustiger.
Daimyo, il est des sentences que j’ai dû rendre, des mesures que j’ai dû prendre, des ordres qu’il m’a fallu donner.
Et pour aucun, autant que je m’en souvienne, je n’éprouve de regret.
Je sais pourtant que tout n’a pas été aimé, ni même apprécié à sa juste valeur. C’est là ce qui guide mes pensées aujourd’hui et me pousse à cette introspection… Car je sais également que certaines rigueurs me sont gardées silencieusement, quand elles ne sont pas exposées publiquement… Me forçant de plus à y réagir plus ou moins violemment en fonction de l’affront commis.
Certains ont-ils été blessés de la distance qui s’est installée entre eux et moi lors de mon ascension au rang de Daimyo ?
Certains s’attendaient-ils à ce que l’amitié que je leur portais ait une influence sur mes décisions les concernant ?
Certains s’imaginaient-ils accéder à des postes élevés sur seule base de la sympathie qu’ils m’inspiraient ?
Certains ont-ils rêvés qu’ils me seraient préférés par les Anciens du clan et nommés à la place que j’occupe désormais ?
A moins qu’on ait pensé que je me ferais pâle reflet de Shunbin-sama en adoptant à la lettre près la politique qu’il avait mise en place, la suivant aveuglément, sans réfléchir, sans apposer ma propre marque, sans me soucier des nouvelles difficultés auxquelles lui n’a pas dû faire face ?
Je ne sais qu’en penser, ni même qu’imaginer pour expliquer le genre d’attitude qu’une poignée de samurai affichent désormais… Mais je ne peux les cautionner. Tout comme je ne comprends ni ne cautionne ceux qui, dans l’ombre, attisent et tournent à leur profit des rancœurs qui ne devraient pas exister…
L’intérêt d’une telle manœuvre, mis à part celui de liguer des frères contre des frères et de mener le clan à sa perte, je ne le connais pas. Malheureusement, accaparé par les autres considérations qui nous ont touchés dernièrement, je n’ai pas vu à temps ce qui se tramait…

Il ne me reste donc qu’à attendre en tenant mon rang. Attendre en continuant de soutenir Karasu et en prenant les décisions qui s’imposent pour son bien.
Attendre qu’ils aient assez de cran pour sortir de l’ombre, pour révéler leur vrai visage à tous, ce que cachent leurs sourires et leur sympathie, pour assumer leurs actions.
Attendre qu’ils osent enfin m’affronter…

Je doute toutefois qu’un tel jour arrive : si le courage avait été leur apanage, cela ferait certainement bien longtemps que je me trouverais auprès de mes ancêtres.
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